
Pendant ma formation en menuiserie et ébénisterie, j’ai découvert (ou redécouvert car ça m’était probablement déjà arrivé) le plaisir d’apprendre.
Cette sensation étrange qui commence par une simple envie, se poursuit par un flot puissant d’incompréhensions, d’hésitations, d’erreurs, ponctué de quelques petites victoires et qui, avec un peu de chance et de persévérance, aboutit à une certaine dose de satisfaction. Voire une joie intense, surtout s’il s’agit de faire quelque chose de ses mains, ce qui permet de matérialiser le chemin parcouru.
Je savais à peine planter un clou quand je suis entrée en formation à la fin de l’été 2016. Au cours des épreuves de mon CAP de menuisier en mai 2017 (que j’ai raconté ici), j’ai réalisé un meuble sous vasque, rehaussé un plancher et posé du parquet.
Et j’ai obtenu mon diplôme.
Le CAP d’ébéniste est venu l’année suivante et si j’en avais eu les moyens et la possibilité, j’aurais adoré continuer les formations et cumuler les CAP.
Céramique, ferronnerie, sculpture… tout me faisait envie.
Mais il était temps de pratiquer mon nouveau métier et je continue en fait chaque jour à apprendre.
A force de poser des questions, de visiter des ateliers, au fil des rencontres, des échanges, des partages, des liens qui se nouent, j’apprends.
Je me surprends à reconnaître les veinages des différents bois, à être capable de conseiller des amis et des collègues.
Je vois les différences entre les pièces que j’ai créées il y a un an et celles qui sortent désormais de mon atelier. Je mesure ainsi mes progrès.
Et ce n’est que le début paraît-il.
Je ne pensais donc pas me relancer dans un réel apprentissage à nouveau.
Et j’imaginais que certaines choses étaient relativement simples.
Comme par exemple concevoir un site internet.
Pour ceux qui ne connaissent pas mon ancienne vie, j’ai travaillé dans la communication et le marketing. Et accessoirement dans le secteur des « nouvelles technologies » (celles d’il y a quelques années en fait maintenant…). Donc même si j’étais plutôt dans la stratégie que la réalisation, je pensais que je serais capable de mettre sur pied un site internet dans un temps raisonnable.
Mais la vie m’apprend aussi l’humilité.
Donc, à peine arrivée en Bretagne, parce que je sais à quel point c’est essentiel, je me suis penchée sur la conception de mon site internet.
Mais il était compliqué de parler de mon activité alors qu’elle existait à peine. D’expliquer ma démarche alors qu’elle était balbutiante.
De montrer des créations qui étaient très probablement appelées à beaucoup évoluer.
Et puis il est très difficile de parler de soi, de s’exposer, de se dévoiler.
Sans parler du fait que si j’ai abandonné mon ancien métier dans la boue acide du monde de l’entreprise, c’est bien parce qu’il n’avait plus aucun sens pour moi. Donc, me marketer moi-même ressemble à une forme de torture perverse.
Mettez tout ça dans un shaker, ajoutez le quotidien d’une entrepreneuse débutante venant d’emménager dans une région qu’elle connaît à peine et où personne ne l’attend ni ne la connaît et qui doit tenter de vivre de la vente de ses créations artistiques.
Multipliez par deux.
Puis par trois.
Ajoutez les saisons, les grasses matinées, les rushs, la désorganisation, les expérimentations, les erreurs, la famille, les amis, la joie… et nous voici début 2020.
J’avais tout de même réussi à décider à peu près quoi dire, sous quelle forme et choisi une plateforme technique.
Précisons que ce dernier choix a évidemment ensuite été systématiquement remis en question par chaque personne connaissant un tant soit peu la réalisation d’un site internet et par chaque artisan en ayant un. J’imaginais qu’un consensus se dessinerait assez rapidement sur ce point. Il n’en est rien et c’est le coeur, le noeud – que dis-je, la corde à noeuds même – du problème.
Car ce fut un problème.
J’ai commencé à bidouiller, à regarder quelques tutoriels et j’ai rapidement conclu qu’on changerait probablement de décennie avant que j’aie le courage d’apprendre tout ça toute seule et d’y arriver.
J’ai engagé une amie d’amie pour poser les bases de mon site et m’expliquer les grands principes.
Nous avancions gentiment et puis nous avons tous été confinés.
J’ai bugué, elle a accouché.
J’ai déménagé dans un nouvel atelier, elle est partie en vacances.
J’ai appris.
Compris ce qui me semblait incompréhensible.
Créé de nouvelles connexions entre mes neurones.
Retrouvé cette satisfaction de l’accomplissement.
Parce que dans la vie sans contact, c’est bien utile un site de vente en ligne.
Même s’il va maintenant falloir trouver des acheteurs en ligne.
Je savoure d’être allée au bout de cette étape-là et je ne suis pas peu fière de vous en montrer le résultat : www.claire-elmosnino.com